www.lalibre.be La nouvelle enquête Pisa réalisée en 2022 montre les dégâts de la crise Covid à l’école Monique Baus 5 - 6 minutes
La Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) a participé à la dernière enquête Pisa destinée à évaluer les compétences des élèves de quinze ans dans 81 pays du monde entier. Chez nous, 2913 élèves nés en 2006 et issus de 103 établissements francophones ont été testés en mars 2022, à peine sortis de la crise sanitaire qui a inévitablement laissé des traces. La pandémie est aussi la raison du report d’un an de l’enquête, prévue normalement tous les trois ans. L’édition précédente datait de 2018. Pisa 2018: les élèves reculaient encore un peu en lecture
- L’impact de la crise sanitaire sur les résultats
Une bonne nouvelle quand même pour commencer : 61 % des participants n’avaient pas redoublé jusque-là et se trouvaient en quatrième secondaire au moment de l’évaluation. On ne dépassait pas 52 % en 2018 et 47 % en 2015. On peut dire que le recul du redoublement se poursuit, même si 6 % des jeunes étaient encore au premier degré et 26 % en troisième année. Moins positif : les élèves de quatrième au moment du test, ainsi que tous ceux qui redoublaient alors leur troisième, ont précisément été les plus impactés par la crise sanitaire, ayant subi au moins six mois d’enseignement hybride dont l’effet apparaît nettement dans les chiffres. 2. Résultats en maths : la dégringolade
Chacune des éditions des tests Pisa met l’accent sur une discipline. La huitième fait le focus sur les mathématiques. Avec un score de 474, la FWB affiche un très net recul par rapport aux résultats précédents de 2018 (moins 21 points). Et celui-ci frappe autant les élèves les plus faibles que les plus forts, et autant les filles que les garçons. Voici le contenu 2022 des questions de mathématiques
Cette dégringolade est aussi collective et sans précédent dans l’OCDE, dont la moyenne recule de 17 points (à 472). Par rapport à dix ans plus tôt, lors de la dernière évaluation approfondie de cette matière en 2012, tous les pays performants de l’époque (sauf le Japon) sont descendus. La chute est même particulièrement impressionnante (d’environ 30 points) en Flandre, aux Pays-Bas, en Allemagne et en Finlande.
Pisa 2022: la Fédération Wallonie-Bruxelles a perdu 21points en math Evolution des scores Pisa en mathématiques de 2000 à 2022 ©ULiège 3. Un nouveau léger recul en lecture
En lecture, la baisse de performance est moins importante qu’en maths, mais la régression entamée en 2012 se poursuit, avec un score en nouveau recul de 7 points (à 474) par rapport à 2018. La descente est toutefois moins prononcée chez nous que dans beaucoup d’autres zones (moins 30 pour la Finlande, près de 20 pour l’Allemagne et la France, moins 19 en Flandre, moins 16 en Communauté germanophone, moins 11 pour la moyenne de l’OCDE fixée à 476).
Entre 2018 et 2022, la Fédération Wallonie-Bruxelles a encore perdu 7 points en lecture Pisa 2022: le recul des élèves francophones en lecture se poursuit depuis 2015 ©ULiège 4. En sciences, les résultats restent relativement stables
Les sciences accusent encore moins le coup que la lecture en FWB. En retrait de 6 points (à 479) par rapport à 2018, les résultats des élèves francophones restent stables et dans la moyenne des pays de l’OCDE (485).
Les performances en sciences des élèves francophones sont restées relativement stables dans le temps Pisa 2022: en sciences, la Fédération Wallonie-Bruxelles recule de 6 points par rapport à 2018 ©ULiège 5. L’inéquité entre élèves se confirme
Ceci étant, comme chaque fois, les scores moyens cachent d’importantes différences entre élèves. En maths, on voit par exemple que 50 points séparent les élèves natifs des élèves issus de l’immigration. Alors que les élèves “à l’heure dans leur scolarité” affichent les mêmes performances que les meilleurs pays, la différence avec ceux qui ont redoublé est de 94 points. Pire : elle atteint 118 points entre les 25 % d’élèves les plus défavorisés et les 25 % les plus favorisés. En 2021, le père de l'enquête Pisa donnait ses bons et ses mauvais points à notre enseignement 6. Le climat se détériore
Autre sujet d’inquiétude déjà évoqué en 2018 : dans les écoles, le climat de travail continue à se dégrader. Toujours au cours de maths, plus d’un élève sur deux se plaint du bruit et de l’agitation. Le prof a bien du mal à calmer les troupes, personne ne l’écoute et, à cause de cela, son cours commence souvent avec du retard. En FWB, le climat en classe est perçu moins favorablement que dans les autres pays et ce, même dans les classes d’élèves les plus performants.
En outre, comme dans d’autres pays de l’OCDE, le niveau d’anxiété a monté d’un cran. La peur d’avoir des difficultés en maths, des mauvaises notes, voire d’échouer, touche près de sept élèves sur dix. 7. On est intelligent ou on ne l’est pas
Enfin, un dernier point d’attention est relevé par les spécialistes de l’ULiège qui ont analysé les résultats de la FWB : il s’agit de la conception “ultra-fixiste” qu’ont les élèves francophones de l’intelligence. En résumé, on est intelligent ou on ne l’est pas, une fois pour toutes. C’est chez nous que cette certitude est la plus ancrée. Dommage, car elle s’accompagne d’une résignation face à l’échec. Ceux qui conçoivent l’intelligence comme des compétences qui peuvent évoluer tout au long de la vie s’engageront plus volontiers dans des tâches complexes. C’est le cas dans les pays scandinaves et anglo-saxsons.
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